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Le lion amoureux : illustrations



Le Lion amoureux : illustrations


Introduction

Christophe, le professeur, prépare les prochaines séances :

Voici le texte de la fable du lion amoureux de La Fontaine.
Il sera à illustrer avec une image de de 20x24cm sur un papier mi-teinte.
Pour demain, ce sera le temps des recherches, donc un carnet de croquis et des crayons devraient suffire comme matériel.

Le texte est sur Wikipedia. On y trouve le lien vers la fable d'Ésope qui l'a inspiré à Jean de La Fontaine sur archive.org et les illustrations de Benjamin Rabier pour une édition de 1906.



Cette illustration est proche du texte dans sa partie narrative : une bergère, un lion et Cupidon, la bergère sur les genoux du lion, le père qui cisaille les griffes, le lion malheureux et sa fin misérable. Est-elle exemplaire de l'illustration au sens large ? La page Wikipedia donne une autre image, celle d'une tapisserie d'Aubusson dont on distingue mal les détails. Son lien avec le texte est incertain.
La tentation est grande d'en chercher d'autres, lion+amoureux+la+fontaine sur Google Images ouvre la porte. On y trouvera de vraies illustrations, des tableaux de peintres célèbres clairement associés à la fable, des oeuvres associés au thème "lion amoureux", des illustrations enfin des éditions de la fable d'Ésope. Il est aisé de les ranger en trois catégories.


Les amoureux

On voit un lion, une femme, un couple. On peut dire que ces images sont des illustrations du titre de la fable, en rien de son contenu.

 


 
On peut ajouter ici un cas unique d'illustration de la chute de la fable :
On lâcha sur lui quelques chiens :
Il fit fort peu de résistance.


Jean-Baptiste Oudry Pierre François Tardieu
1759

Plus intéressantes seront les illustrations qui concernent la fameuse morale :

Amour, Amour, quand tu nous tiens
On peut bien dire : "Adieu prudence."


L'amoureuse témoin de la mutilation du lion

On regroupe toutes les représentations donnant à voir la mutilation du lion en présence de plusieurs personnages dont l'amoureuse, laquelle est seulement témoin. L'attitude réciproque des amoureux varie d'une oeuvre à l'autre et fait le sel de la comparaison.

 
 
 
 
Le regard de la bergère est rarement éploré, neutre, lointain en général, voire méprisant ou cynique. La catégorie suivante est toute proche.


L'amoureuse partie prenante de la mutilation du lion


Dans cette troisième catégorie, la position de l'amoureuse est explicitement du côté de la duperie. Elle porte les outils (ciseaux ou limes) en douce ou clairement, elle utilise ces outils seule ou avec de l'aide.

 

Alors ?


Voila l'essentiel des oeuvres présentes sur le web sur le thème "le lion amoureux". Le résultat est étonnant. En effet, dans les trois quarts des cas on observe les outils de la proposition de la fable :
Lui dit : "Ma fille est délicate ;
Vos griffes la pourront blesser
Quand vous voudrez la caresser.
Permettez donc qu'à chaque patte
On vous les rogne, et pour les dents,
Qu'on vous les lime en même temps.
Vos baisers en seront moins rudes,
Et pour vous plus délicieux ;
Car ma fille y répondra mieux,
Étant sans ces inquiétudes " .
Le Lion consent à cela,

C'est l'avis général, limes et ciseaux sont au coeur de l'histoire. Mais la fable ne contient aucune indication, par contre, que l'amoureuse assiste à la scène, encore moins qu'elle y participe. Cette bergère ne dit rien, ne fait rien, c'est juste une fille qu'on demande en mariage à son père. Elle ne dit ni oui, ni non, on ne lui demande pas son avis. Quant à se retrouver nue sur la peau du lion, n'en parlons pas. Ces illustrations racontent une autre histoire. Pourquoi pas ? Mais en illustrant la fable de cette manière ils induisent une lecture de sa morale. Le lion perd toute prudence, la fille assiste ou participe au crime. Il fallait donc être prudent envers la fille. La pauvre, c'est son père qui tend un traquenard et c'est elle qui passe pour une garce, dont il convient de se méfier, bien sûr. Le poète n'a rien dit de tel, la prudence s'imposait vis à vis du père et non face à la bergère. Les illustrateurs d'Esope faisait déjà cet écart. La traduction de la morale grecque est :
Cette fable montre que ceux qui se fient aisément aux autres, une fois qu’ils se sont dépouillés de leurs propres avantages, sont facilement vaincus par ceux qui les redoutaient auparavant.
Dans cette fable le père vire le lion édenté à coup de bâton. Celui qui dépouille, craint et triomphe est le père, celui qui est dépouillé et vaincu, c'est le lion. Les illustrations d'Ésope montrent les trois personnages. Les textes font de la fille l'argument du père contre le lion, les illustrations font de la fille son exécutant. Le mensonge du père dans le texte devient la faute de la fille dans le dessin. Courselles-Dumont va au fond des choses et fait de la bergère une catin qui balance mollement sa paire de ciseau au bas de son hamac. Grande est la liberté de l'illustrateur, celle du spectateur aussi. L'exercice ouvre un débat.